Lybie : les horreurs de la guerre et le partage du monde
Des signes évidents de discorde entre Etats membres de l’Otan engagés militairement en Libye sont apparus mercredi lorsque l’Italie a réclamé un cessez-le-feu qui n’est pas du goût de la France.La Chine a par ailleurs infligé un nouveau revers diplomatique à Mouammar Kadhafi en recevant le » ministre des Affaires étrangères » du Conseil national de transition (CNT), mis sur pied par ses opposants à Benghazi. » Le besoin de rechercher un cessez-le-feu est devenu plus pressant « , a déclaré Franco Frattini. » Je pense qu’en plus d’un cessez-le-feu, qui est la première étape de la négociation politique, un gel humanitaire de l’activité militaire est fondamental pour permettre une aide humanitaire immédiate « , a ajouté le chef de la diplomatie italienne, qui s’exprimait à la Chambre des députés.Ses propos, qui traduisent l’anxiété manifestée à Rome depuis un moment, ont suscité une vive réaction du Quai d’Orsay. » La coalition et les pays réunis au groupe de contact d’Abu Dhabi il y a deux semaines ont été unanimes sur la stratégie: il faut intensifier la pression sur Kadhafi. Toute pause dans les opérations risquerait de lui permettre de gagner du temps et de se réorganiser « , a réagi Bernard Valéro, porte-parole du ministère français des Affaires étrangères.
» La bonne approche pour le moment est d’accentuer la pression sur Kadhafi « , a lui aussi estimé un porte-parole de David Cameron, chef du gouvernement britannique.
Le ministère italien des Affaires étrangères a par la suite nuancé les propos de Franco Frattini, assurant qu’il ne s’agissait pas d’une proposition italienne mais d’une idée évoquée le 18 juin au Caire lors d’une rencontre entre Etats membres de l’Union européenne, de la Ligue arabe et de l’Union africaine.
Médiation de l’OCI » Ce que le ministre Frattini a déclaré ce matin au Parlement c’est que l’Italie étudie toutes les idées à même de soulager les souffrances des civils « , a expliqué un porte-parole.Le cessez-le-feu, également réclamé par les Nations unies, a-t-il ajouté, pourrait ne s’appliquer qu’à Misrata et au djebel Nefoussa, deux secteurs aux mains des rebelles assiégés par les forces gouvernementales.L’Union africaine a quant à elle jugé qu’en l’absence de résultats militaires, les puissances occidentales allaient devoir accepter son plan qui prévoit également un cessez-le-feu.L’Organisation de la Conférence islamique (OCI), qui réunit 57 Etats, a par ailleurs dépêché une mission de médiation en Libye. Elle se rendra à Benghazi et à Tripoli.
Nouvelle plus amère pour Mouammar Kadhafi, le ministre chinois des Affaires étrangères, Yang Jiechi, a annoncé que Pékin considérait désormais les insurgés libyens comme des » interlocuteurs importants « .
Yang, dont les propos sont repris par le site de son ministère (www.mfa.gov.cn), s’est exprimé lors d’une visite à Pékin de Mahmoud Djibril, représentant diplomatique du CNT. Les réticences de la Chine à apporter son plein soutien aux efforts déployés par les Occidentaux pour chasser Kadhafi sont considérées comme l’un des facteurs de son maintien, en dépit des raids aériens de l’Otan.A ce jour, au moins huit gouvernements européens et arabes ont reconnu le CNT comme le seul représentant légitime du peuple libyen. Le revirement chinois pourrait signifier que Pékin considère désormais que les jours de Kadhafi sont comptés.Sentiment d’insécurité à MisrataPlusieurs roquettes se sont abattues sur Misrata, le grand port de l’Ouest assiégé depuis des mois par l’armée. Elles n’ont fait aucun blessé mais elles ont dissipé le relatif sentiment de sécurité qui s’était installé depuis que les rebelles ont repoussé les forces gouvernementales des abords de la ville, à la mi-mai. » Tout le monde est inquiet. Nous ne savons plus où aller. Je ne serai en sécurité qu’une fois mort « , dit Mohammed Mabrouk, qui habite l’une des deux maisons touchées par les roquettes.
Les combats de Misrata ont surtout touché des quartiers périphériques de l’ouest et de l’est de la ville, où les insurgés subissent de plus lourdes pertes que les forces gouvernementales, mieux équipées et mieux entraînées.
Les rebelles ont tenté de progresser vers l’ouest, en direction de Zlitane, assiégée par les forces gouvernementales.
La télévision libyenne a fait état de « dizaines » de morts à Zlitane, bombardée par des navires de l’Otan.
Ces informations n’ont pu être confirmées de source indépendante, les journalistes étrangers n’ayant pu entrer dans Zlitane. L’Otan ne donne que le lendemain des informations sur ses opérations en Libye.
Si les informations de la télévision libyenne se confirmaient, elles risqueraient de compliquer la mission de l’alliance qui a déjà dû reconnaître dimanche que des civils avaient été tués dans un raid aérien à Tripoli.
Source : Reuters